Coup de cœur lecture : Lydie

Petit tour à la médiathèque ce matin, pour rendre la vingtaine d’ouvrages empruntés pour l’été (on a droit à 4 livres par carte, mais les vacances c’est buffet à volonté, surtout qu’on nous connaît bien :3), et refaire le plein. Dans le coin BD, je jette un œil distrait, et tombe en arrêt devant « Lydie », de Jordi Lafebre et Zidrou.

Couverture sépia, dessins assez réalistes et dans le même temps un peu caricaturaux (qui me rappellent un autre dessinateur mais je ne mets pas la main dessus) et personnages un peu atypiques (la dame a un long nez, ce n’est pas un canon de beauté), et puis… la scène a un petit… truc, qui la rend bizarre, attirante : la dame, souriante, attentive, tient dans ses bras… rien. Un vide en forme de bébé. Que l’homme – son père à elle – regarde aussi, un sourire un peu plus crispé sur les lèvres.

La quatrième de couverture nous cite juste un extrait : « Mon bébé ! Les anges du ciel me l’ont rapporté ! […] La place d’un bébé, c’est contre le cœur de sa mère, pas au paradis. ».

Je commence à lire, et suis scotchée dès la première page : jolies couleurs, un peu éteintes, mais qui transmettent une sorte de vie. Nous sommes dans les années 30. On entre dans l’impasse du bébé à moustaches, baptisée ainsi par ses habitants à cause d’un appendice poilu bien fourni peint par un inconnu sur une réclame pour du savon dans ladite impasse.On croise quelques personnages, la vie est dure, Victor l’imprimeur doit encore une fois tuer les petits de sa chatte, avant que ses enfants à lui ne se lèvent. Et Camille Tirion vient d’accoucher d’une fille morte-née.

« Aujourd’hui est un mauvais jour pour les bébés », dit la petite statuette de bois et de tissu dans l’alcôve.

Mais Camille ne peut pas supporter sa perte. Et « redécouvre » son bébé dans son berceau quelques jours plus tard. Sa petite Lydie est vivante, bien évidemment, le bon Dieu serait-il bon s’il séparait les enfants de leur mère ? Bien sûr, on la croit folle, le berceau est vide, et la Camille est un peu simple, après tout. Mais les « moustachus », les habitants de l’impasse, se prennent au jeu, parce qu’un mensonge qui met du baume au cœur c’est mieux qu’une douloureuse vérité, et progressivement l’enfant acquiert une existence dans l’esprit de tous les voisins.

Je n’en dirai pas plus, je vous laisse découvrir cette petite merveille, touchante, troublante – en effet, les choses existent-elles parce qu’on croit en elles ? – dessinée de manière très tendre, un peu Loisel, ah voilà, j’ai retrouvé ! Ces nez imposants, larges et ces grands sourires ! Le scénario met en scène des personnages que la vie n’a pas aidés, qui sont aigris et pourtant plein de bonté, d’humanité.

Allez, j’avoue, j’ai failli pleurer à la médiathèque. Oui, parce que je l’ai lu en entier. Et après on a dû se grouiller parce que ça fermait, et il a fallu faire un choix parce que je croyais que c’était 6 livres et pas 4.

(les images viennent de chez BD Gest’ : lire les premières pages chez eux)

(précédemment publié sur le Griffon griffonnant en septembre 2012, mais ce n’est plus sa place)